Sur le thème du bavard qui s’enivre, déblatère, perd tout contrôle en perturbant l’assistance, libérant une parole enfouie, Vino generoso est une parfaite petite réussite et anticipe sur le personnage de Zeno dont il est à la fois un double et un précurseur puisqu’il s’agit d’un texte ancien. Plongeant le lecteur dans un univers bourgeois convenu, cette nouvelle dynamite l’ordre établi en exploitant le formidable ressort de l’ivresse, car le vin libère les forces autant que la parole. Les tranquilles fiançailles qu’on nous raconte, moment social par excellence, celui du contrat, éclatent en mille morceaux sous les coups de butoir de celui qu’on n’a pas su empêcher de s’enivrer. Mais là où Svevo est unique et génial, c’est qu’il conclue sa scène par un moment de rêve expiatoire inattendu…