On dit qu’Aubervilliers n’a après tout pas tant changé que cela depuis l’époque où on parlait d’elle comme d’une banlieue rouge, un territoire qu’une frontière invisible séparait des beaux quartiers. En lisant le livre que Léon Bonneff tira de ses incursions et de ses enquêtes dans la ville au début du XX° siècle, on espère que le temps s’est chargé malgré tout d’estomper les misères qui s’y abattaient et qu’il décrit avec une précision empathique jamais dénuée de dérision. Offrant paradoxalement la vision de deux villes, celle des riches maraîchers ignorant avec arrogance celle des prolétaires crevards, l’écrivain engagé, surtout intéressé par les seconds, a dépeint un monde où le capitalisme le plus sauvage et le plus rude broie les êtres. Aubervilliers est de ces livres, mi-document, mi-fiction, qui ne se laissent pas oublier. Il nous paraissait important de lui redonner vie. Il sera en librairie, pour l’édification de tous, dès le 13 avril, dans la collection L’Alambic d’Eric Dussert.