Il n’est pas si loin le temps où se moquer d’un militaire, surtout avec des galons, était une tradition solide quoique risquée. On ose moins désormais rire de la formidable imbécillité qui semble sourdre de cette institution qui a érigé le respect des ordres en absolu indépassable. La littérature y a perdu un joli champ de mines déconfites.
Qu’on se souvienne alors avec délectation du Colonel Ramollot, cette baderne intégrale qui fit rire les Français pendant quelques décennies grâce à sa capacité à pousser à leur paroxysme les hautes qualités de notre peuple : ignorance abyssale, trivialité du langage, incapacité de raisonner, brutalité instinctive… Cet imbécile magnifique persuadé d’avoir toujours raison nous réjouit encore, nous faisant presque regretter cette belle époque où l’humour n’était pas abandonné aux cyniques provocateurs et bien pensants.
Mais Le Colonel Ramollot est avant tout un livre d’une formidable drôlerie sur le langage et sur la manière de le faire coïncider avec une figure caricaturale.