Porté à l’excès sur la morphine, Marc Stéphane est interné de force à Sainte-Anne pendant trois mois avant de calmer ses délires incontrôlables. Assez vite conscient de ce qui lui arrive, il va gagner le droit à une pièce isolée d’où il notera les épisodes, les rencontres et les réflexions que lui inspire cette atroce cour des miracles désespérée dans laquelle échouent ceux qu’une société a décidé d’éliminer, ce «bagne où le déchet humain dans ce qu’il a de plus pitoyable, est torturé sournoisement, par des chaouchs en démence alcoolique ou des prétendus savants dont la geste de folle incohérence prouve qu’ils sont les premiers et les plus probants aliénés de leurs affreux asiles».
Livre hallucinant d’un halluciné sorti de l’enfer, voyage au bout d’une nuit opaque, La cité des fous est l’un des plus terribles réquisitoires écrits sur l’enfermement sans renoncer à l’usage d’une langue violente d’où jaillit une compassion intense et jamais mièvre. Portraits de fous intenables, d’infirmiers débiles mais prisonniers eux aussi, de médecins ignares, scènes d’une vie quotidienne sans issue, ce texte est une exception que sa véracité rend encore plus impitoyable.