Le charme vénéneux de Mary Elizabeth

On lui donnerait le bon Dieu sans confession, mais ce regard perçant semble suggérer qu’il ne faut pas se fier aux apparences. L’Américaine Mary Elizabeth Counselman est un des grands noms du fantastique d’après-guerre mais, disparue octogénaire en 1995, son étoile a pâli et il n’y a guère que les amatrices et amateurs de S.F. pour réagir en entendant son nom. Il est assez difficile, y compris dans son pays, de se procurer ses recueils. C’est qu’elle a traversé son siècle avec une discrétion qui n’a d’égal que son talent pour conter des histoires dans la tradition d’Edgar Poe mais avec cette finesse cruelle et souvent drôle qui n’est qu’à elle, comme si elle partageait la peur de ses héros terrifiés, souriant à demi en racontant des étrangetés et des destins inquiétants. Aux États-Unis, elle fait figure de classique, aussi on comprend mal qu’elle n’ait jamais été éditée en volume en France. Nous comblerons cette honteuse lacune et serons donc ravis de l’accueillir sur l’une de nos branches à l’approche de l’été, histoire de faire un peu d’ombre au milieu d’une lumière éclatante…