On est toujours étonné dans notre pays qui se prend si au sérieux mais qui aime tant rire, quand un comique ou un humoriste quitte son territoire légitime pour s’aventurer sur le terrain délicat du drame. Bourvil s’y est risqué, sans doute un peu tard, notamment avec Jean-Pierre Melville. Plus inattendu et moins reconnu, Elie Seimoun qui doit désormais se contenter de Ducobu, a, sous la direction du trop discret Philippe Collin, accompli une jolie prouesse en interprétant il y a vingt ans le personnage principal de l’adaptation du génial roman de Tristan Bernard que nous republions le 21 février, Aux abois. On le conseille volontiers à ceux qui savent surmonter leurs a priori. On conseille surtout de ne pas manquer notre réédition du mois qui souhaite, modestement, rendre justice à une œuvre majeure et pour le moins méconnue d’un grand écrivain qui, lui aussi, est encore victime de préjugés qui le cantonnent à son rôle d’humoriste.
On relaie avec plaisir un extrait de l’article du Monde paru au moment de la sortie du film :
“Tout se passe dans un univers sans bruit, celui de l’intériorité psychotique de ce solitaire. Comme dans une bande dessinée, les plans qui alternent visions larges et détails très rapprochés ressemblent à des cases savamment composées. Pas de passants, pas de foule, seulement des mots échangés avec les rares personnes rencontrées, ou avec lui-même, dont certains se fondent progressivement dans la fabuleuse bande musicale (signée Jean-Claude Vannier*).”
* Jean-Claude Vannier, rien que ça, magnifique arrangeur et compositeur, dont nous aimerions bien un jour rééditer l’unique recueil de nouvelles.
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