Un Letton de beau métal

On nous regarde souvent avec un peu de commisération quand nous annonçons, béats, que nous allons publier un recueil de nouvelles… Quelle idée ! Qui cela intéresse-t-il encore ? Lorsque nous avons évoqué notre bonheur de remettre en lumière un auteur letton (avec des accents bizarres sur les lettres), mort en 1924 à 33 ans et quasi inconnu en dehors de son petit pays, nous avons carrément senti de la pitié chez nos interlocuteurs, mâtinée d’inquiétude, comme si nous commencions à perdre un peu la raison et qu’il allait peut-être falloir commencer à envisager d’arrêter l’édition pour se lancer dans le maraîchage ou quelque autre saine activité. Comme nous sommes ce que l’on peut appeler en toute simplicité des bourriques et que la lecture de Janis Ezerins, traduit par Jean-Jacques Ringuenoir et Gita Grinberga, nous a littéralement transportés, nous n’avons écouté que notre cœur vaillant : c’est ainsi que paraît aujourd’hui en librairie le recueil Partie d’échecs, un petit livre d’à peine 150 pages (avec une illustration d’Alfred en couverture) qui permettra peut-être à quelques uns de faire connaissance avec un génial écrivain inconnu. La mise en place en librairie est tellement faible – il n’y a pas de miracle – que nous ne ferons même pas de service de presse. Le livre fera un tout petit tour de piste discret avant de disparaître mais nous aurons eu cette joie de redonner un peu de lumière à un immense minuscule auteur.